L’Alsace fut loin d’être épargnée par toutes ces tragédies… Elle en fût souvent le théâtre ! ! !
Ces guerres qui n’épargnent rien
Au 12° siècle, sous le règne de Frédéric Barberousse de la dynastie des Hoenstauffen, la région connaît un essor formidable. Lépisode de la Décapole, réunion de dix villes libres dAlsace, est la preuve de la puissance économique et intellectuelle de lAlsace. Puissance technologique aussi : la construction de la cathédrale de Strasbourg constitue une prouesse technique de premier ordre.
Mais la guerre de cent ans népargne pas cette région de passage et des envahisseurs, comme les Armagnacs, les Bourguignons et les Anglais, y laissent de cuisants souvenirs.
Le XVI° siècle
Le XVI° siècle est, paradoxalement, à la fois celui de lépanouissement intellectuel de lAlsace grâce aux idées de la réforme protestante et celui de son écroulement politique et économique à cause de la guerre de trente ans. On a du mal à simaginer aujourdhui le rôle que Strasbourg, Sélestat et dautres villes alsaciennes ont joué dans la naissance et le développement du protestantisme. Si des Théologiens de renom comme Martin Bucer, Beatus Rhenanus vivaient et professaient en Alsace, de plus grands noms comme Luther ou Calvin y habitèrent également. Quest ce qui les poussait à venir en Alsace ?
Plus que la qualité des universités et la tolérance du pouvoir, cest lessor dune technique nouvelle, limprimerie, qui attira tous ceux qui désiraient diffuser largement les pensées nouvelles sur la place de lhomme dans le monde. De nos jours, on peut comparer linvention de lInternet à celle de limprimerie.
La guerre de Trente Ans
Pourtant au moment où lAlsace atteint des sommets intellectuels, une terrible épreuve laccable : la guerre de Trente Ans et son cortège infernal de soldats assoiffés de pillages et de meurtres sabat sur son sol. Ce sont dabord les troupes de laventurier Mansfeld, ensuite les Impériaux venus les chasser, puis les Espagnols, les mercenaires de Saxe et enfin les Suédois qui se montrent particulièrement cruels. Guerre, famine et épidémies anéantissent cette région prospère. La France na plus quà se pencher pour la ramasser…
Cest ce que ne se prive pas de faire Louis XIV… Mieux, il va remettre lAlsace daplomb, lui redonner sa prospérité matérielle tout en lui laissant ses libertés intellectuelles et religieuses. Le Royaume de France au faîte de son rayonnement construisit également de nombreux et gracieux édifices dans les grandes villes. Lattachement quasi-amoureux de lAlsace à La France vient sans doute de cette époque-là.
La défaite de 1871
Cette relation entre les alsaciens et la nation française se retrouve dans les images dEpinal qui racontent lépopée napoléonnienne. Dans tous les foyers alsaciens de lépoque, lEmpereur est vénéré. De nombreux romans exhaltent ce patriotisme, comme lAmi Fritz dErckmann-Chatrian. Mais la défaite de lAigle Corse signe la fin dune époque quun autre Napoléon, le troisième du nom, enterra définitivement avec la défaite de 1871. LAlsace est alors abandonnée à logre Bismarck. LAlsace est de nouveau allemande…
Une fois de plus lhistoire de lAlsace accouche dun nouveau paradoxe : les envahisseurs allemands ont des attentions particulières pour notre région. Lindustrie est florissante et le commerce en plein essor. Leau courante, le gaz, lélectricité, la sécurité sociale font partie des cadeaux du pangermanisme à sa province reconquise. Et même si le coeur des Alsaciens bat toujours pour la France, lAllemagne gagne des points dans les esprits.
La première guerre mondiale
Mais la première guerre mondiale écaillera rapidement le vernis civilisé du pangermanisme : pour éviter les désertions en masse, les jeunes alsaciens sont invités fermement à combattre pour le Kaiser en… Russie ! La grande guerre, encore un paradoxe, ne saigne pas trop lAlsace. Le front des Vosges avec la bataille du Vieil Armand, tient là son Verdun régional, mais les populations accueillent larmistice avec plus de peur que de soulagement. A Strasbourg, un soviet de soldats veut faire main basse sur la ville. La libération définitive de Strasbourg le 23 novembre 1918 par les poilus donne lieu à des scènes dintense bonheur.
Pourtant il subsiste un profond malaise. La République Française, douloureusement marquée par quatre années de guerre, voit maintenant des boches partout et surtout en Alsace. De zélés fonctionnaires entreprennent déradiquer ce funeste atavisme.
L’après guerre
Malgré tout, limmense bêtise de ladministration française nest rien en comparaison de la violence de son homologue nazie. En 1940, la victoire allemande surprend lAlsace qui se retrouve, soudain, rattachée au 3° Reich. Mais les belles manières des aristocrates prussiens de 1870 ont fait place à la sauvagerie organisée des Nazis et inexorablement la région senfonçe dans la nuit et le brouillard. Des milliers de jeunes alsaciens sont enrolés de force dans la Wehrmacht et tomberont sur la neige sale du front de lEst. LHistoire les appellera les « Malgré nous ». Dautres réussiront à rejoindre la France Libre et participeront à la libération de leur province avec la 2° DB de Leclerc. LHistoire les appellera des « héros ».
Il y eut des héros et des malgré-nous dans chaque famille alsacienne, cest ce que raconte une statue de la place de la République à Strasbourg. Elle représente une mère alsacienne qui porte les corps sans vie de ses deux fils dans ses bras. Lun des corps est orienté vers lAllemagne, lautre vers la France.
Le choix de Strasbourg, dès 1959, pour abriter le Conseil de lEurope, puis plus tard le Parlement Européen, est un choix autant politique, géographique, quhistorique. Les deux piliers de la construction européenne sont la France et lAllemagne et la seule province commune à ces deux nations est bien lAlsace.
Aujourdhui lAlsace doit relever dautres défis, défense de sa langue et de son patrimoine, promotion de ce même patrimoine, intégration dans le concert des grandes régions européennes… beaucoup de challenges pour la plus petite et peut-être la plus attachante des régions françaises, qui restera toujours ma « petite patrie ».
Article tiré de : http://www.visit-alsace.com/librairie/indexfr.html